Etude du marché de l'électricité en Allemagne : chiffres clés et explications

Mis à jour le
min de lecture

Drapeau allemand

Le prix de l'électricité pour les ménages en Allemagne est largement supérieur à celui de l'Hexagone. Les taxes, finançant notamment le développement des énergies renouvelables, y sont également supérieures. Pourtant, France et Allemagne partagent de nombreux points communs sur leurs marchés de l'électricité.

Un prix de l'électricité en forte hausse dans les années 2000

Prix du kWh en Allemagne entre 1998 et 2013

Ce graphique nous montre une doublement du prix du kWh de 13,94 centimes en 2000 à 28,73 centimes en 2013.

Le prix a augmenté sous l'effet :

  • d'une augmentation du prix de base (production, transport et distribution) à un rythme de 4% par an
  • du passage de 16 à 19% de la TVA en 2007 
  • de l'explosion de l'EEG, équivalent de la CSPE française, qui finance les énergies renouvelables
  • de l'apparition de la contribution paragraphe 19, qui fait payer les ménages pour une partie des coûts de réseau des entreprises
  • de l'apparition de 3 petites taxes: Stromsteuer (impôt sur l'électricité), KWK Aufschlag (supplément de soutien à la cogénération) et Offshore-Haftungsumlage (supplément de soutien à l'éolien offshore).

En 2013, le prix de base de l'électricité pour les particuliers représente 50% du prix du kWh final, soit 50% de taxes. Celles-ci sont largement tournées vers le soutien aux énergies renouvelables (environ 5,5 centimes par kWh).

Comparaison avec la France

En France, leprix de l'électricité a nettement moins augmenté dans les années 2000, passant d'environ 10 c€/kWh en 2000 à 13,7 c€/kWh en 2013. Pourtant les taxes ont également augmenté. C'est en réalité le prix de base du kWh français qui a augmenté en moyenne d'1 à 2% par an, là où il augmentait de 4% par an en Allemagne, qui explique la différence.

En outre, la France a nettement moins développé son parc de production, tandis que l'Allemagne, qui a fait le choix de l'abandon du nucléaire en 2000, a du développer des centrales à charbon et des capacités renouvelables.

Le parc de production d'électricité allemand

Source2010
TWh
2011
TWh
prévision 2012
TWh
% de la production 2012
Lignite145,9150,1159,025,74%
Houille117,0112,4118,019,1%
Nucléaire140,6108,099,516,1%
Gaz naturel86,882,570,011,33%
Fioul8,46,810,01,61%
Renouvelable, dont:103,3123,5136,222,05%
  • Eolien
37,848,946,07,45%
  • Hydroélectrique
21,017,721,23,43%
  • Biomasse
28,132,836,05,8%
  • Photovoltaïque
11,719,328,04,53%
Divers26,725,625,04,04%
Production brute628,6608,9617,6 
Importation42,249,744,2 
Exportation59,956,067,3 
Solde des échanges- 17,7- 6,3- 23,1 
Consommation (avec pertes réseau)610,9602,6594,5 

L'Allemagne produit encore 45% de son électricité à partir de charbon (lignite et houille) mais le pays est engagé sur une voie responsable à deux égards:

  1. L'engagement de sortir du nucléaire à horizon 2022 pris par le gouvernement Schröder est en bonne voie avec une part de l'électricité nucléaire en baisse de 40% entre 2010 et 2012 à 16% de la production.
  2. Les énergies renouvelables représentent une part deux fois supérieure du mix énergétique par rapport à la France, et l'hydroélectricité n'est plus la première énergie renouvelable. La biomasse (bois, pellets...) a pris une part considérable à près de 6%, tandis que l'éolien, notamment offshore s'est développé dans des proportions importantes. Là où la production photovoltaïque française n'excède pas 1%, l'Allemagne avait déjà en 2012 plus de 4,5% d'énergie solaire dans sa production.

En outre, l'Allemagne est exportatrice nette d'électricité, notamment vers la France.

Une électricité moins chère pour les entreprises que pour les ménages

L'Allemagne a mis en place une fiscalité différenciée pour les entreprises et pour les ménages afin de soutenir la compétitivité de son industrie.

Le Paragraph 19-Umlage

Paragraph 19-Umlage
 Jusqu'au 100 MWh par anAu delà de 100 MWhEntreprises dont plus de 4% du chiffre d'affaire part en coût d'électricité (électrointensifs)
Taxe 20121,51 euro/MWh0,5 euro / MWh0,25 euro/MWh
Taxe 20133,29 euro/MWh0,5 euro/ MWh0,25 euro / MWh

On le voit, cette taxe favorise les entreprises et les électrointensifs au détriment des ménages. La valeur de 100 MWh par an (environ 30000 euros de facture annuelle) est judicieusement choisie car elle écarte les petits professionnels et les ménages, mais laisse une possibilité aux PME industrielles d'en bénéficier.

Evolution du prix de l'électricité pour les entreprises en Allemagne entre 1998 et 2013

Evolution du prix de l'électricité pour les entreprises en Allemagne entre 1998 et 2013

Pour une consommation comprise entre 160 et 20000 MWh, les entreprises allemandes paient leur électricité deux fois moins cher que les ménages! L'absence de TVA n'explique pas tout.

Raccordés directement au réseau moyenne tension, les industriels ont des coûts de base (production, transport, distribution) deux fois inférieurs aux particuliers. La redevance de concession est négligeable, 15 fois inférieure à celle des particuliers. Enfin, les petites taxes de soutien aux énergies renouvelables, proportionnelles au prix de base, sont beaucoup plus faibles.

L'Allemagne, exportatrice d'électricité vers la France

La carte des interconnexions électriques entre la France et l'Allemagne montre un solde exportateur de l'Allemagne surprenant: en fait, la France et son parc nucléaire absorbe les surplus, bon marché, d'électricité renouvelable produite en Allemagne lorsque le vent souffle ou que le soleil brille.

échanges France/Allemagne

On remarque que la France vend de l'électricité à l'Allemagne quand les énergies renouvelables sont au repos (nuit) et que l'Allemagne exporte en France quand ses parcs éoliens tournent ou que sa production photovoltaïque fonctionne (milieu de journée).

En 2013, la France a exporté ainsi 5,3 TWh d'électricité vers l'Allemagne, qui lui en vendait en parallèle 15,1 TWh. La France a donc un solde importateur de 9,8 TWh, soit au prix de marché spot allemand moyen 2013 (37,8 euros/MWh), environ 370 millions d'euros.